Le
Modèle
De petite taille, un
corps qui avait l'apparence d'être à peine sorti de la puberté, elle était un
modèle recherché par les peintres et les sculpteurs de cette ville en
haut de la montagne. Pendant la saison des vacances les touristes qui
affluaient, achetaient tableaux et sculptures où elle figurait dans des
différentes poses toujours avec un ruban jaune qui retenait ses boucles folles
aux couleurs cuivre.
Georges avait
soixante-quinze ans, il était veuf, il vivait dans un grand appartement près de
la place centrale, Il aimait l'art, surtout la sculpture régionale de tous les
pays. Sculptures d'Afrique et Esquimaude se côtoyaient dans une grande vitrine
qui parcourait les deux murs de son salon. Une femme maya tournait son dos à un
Monk chinois, un Andalou côtoyait un Aztèque. Un méli-mélo de cultures vivait
harmonieusement et en paix dans ce domaine.
Son fils lui rapporta
de son séjour à la montagne une statue en bronze de grandeur moyenne,
d'une femme-enfant assise sur un tabouret les genoux pliés sous elle, un vrai
ruban jaune retenait ses boucles folles.
Georges comme chaque
fois qu'une nouvelles statue venait habitait chez lui, avant de la posait dans
la vitrine, la posait sur une table en face de son fauteuil préférée. Il la
contempla quelque temps dans tous les angles et décida que si elle n'était pas
une œuvre d'art, une force émanait de cette figure. Deux mois plus tard elle
prenait place à côté d'un Kamikaze Japonais.
Le Kamikaze avec son
foulard blanc s'écarta d'un millimètre de sa nouvelle voisine.
02h37 du matin un
fracas fait sursauter Georges de son sommeil, la fin du monde? La bombe
atomique? Il allume sa lampe de chevet, chausse ses pantoufles, et se dirige
vers son salon. L'immense vitrine s'est écroulée, le sol est jonché de débris
de verre, et de morceaux de statues fracassées. Ébahi il regarde la fin du
monde…pour lui c'est la fin du monde, des années à collectionner assidûment,
envolées sans raison apparente en débris. Il regarde attentivement si quelque
chose a survécu, il ne voit que la destruction…. Soudain son regard se pose sur
la table près de son fauteuil, elle est là, le Kamikaze, sans tête repose à ses
pieds….