22 février 2013


Cœur de Pierre


Étendu sur la table d'autopsie à la Morge, tout son être sans vie repose plus beau et plus parfait que jamais.

Il s'est écroulé d'un coup pendant son entraînement journalier de squash, son dernier souffle  évaporé dans le bruit de la balle frappant le mur, il avait quitté la vie comme il l'avait vécue, à une vitesse interdite.

Sa famille avait demandé l'autopsie pour connaître la raison du  décès. Sa femme voulait assister à l'opération. La vie avec lui pendant 13 ans l'avait endurcie; elle voulait savoir le secret de ce beau corps au cœur de pierre; elle voulait voir l'intérieur de ce corps qu'elle avait tant caressé, aimé, où elle s'était enivrée de son odeur. Elle voulait savoir ce que cachait cette carapace parfaite. Elle voulait connaître le secret du contraste de la perfection du corps  avec l'imperfection de l'âme.

On attendait le chef. Le fameux médecin légiste qui devait superviser l'autopsie, la salle froide, stérile, toute en chrome, sans aucune odeur détectable était fortement illuminée, aucun luxe, des outils chirurgicaux étincelants de propreté étaient posés sur une table près de la tête à la belle chevelure  claire. Sa chevelure, sa parure gardait encore tout son éclat.

 On avait précisé que l'autopsie commencerait par le thorax, si la raison de la mort  était là, on s'arrêterait, sinon la prochaine étape serait le cerveau. Son brillant cerveau de mathématicien,  d'ordre,  son cerveau aux multiples chambres, son cerveau qui cachait le savoir de la réussite et du succès en un minimum de temps et d'effort. Elle espérait qu'il resterait intact pour son dernier voyage...

L'autopsie commença, le chef, un bistouri dans sa main, débuta l'incision, les larmes inondaient son visage,  elle détourna la tête, elle attendait de voir le cœur.

Des bruits, une odeur étrange, des murmures, des ordres, encore des bruits, elle tourne la tête.

Le cœur repose sur un plateau, il est couleur cendre, comme s' il était passé par le feu, le chef conclut que cet organe n'a pas l'air humain, pourtant il a causé la mort.

Elle se dirige vers la sortie

L'Enfant bouge en elle.

Une ombre  transparente se glisse par une nuit sombre, s'empare du bocal rempli de formol où le cœur de pierre repose.…

Une étoile lance son code avec le premier souffle de l'enfant


1 commentaire:

Tahar Yettou a dit…

Bonjour,Jale.
Poignant texte !
Merci pour le partage.
Amitié.
Tahar